Monday, March 16, 2015

Il n'est jamais trop tard pour bien faire

Dans un arrêt rendu ce jour, la Cour suprême de Californie (la juridiction suprême de l'Etat de Californie, à ne pas confondre avec la Cour suprême des Etats-Unis) vient d'offrir une réhabilitation symbolique et posthume à une victime de la discrimination raciale et, plus précisément, des lois dirigées contre l'immigration asiatique.

Comme l'expose le Los Angeles Times, elle vient en effet, à l'unanimité, de faire droit à la demande d'inscription au barreau de Californie d'un avocat d'origine chinoise, Hong Yen Chang, qui s'était vu refuser son inscription au barreau... en 1890! Hong Yen Chang, ressortissant chinois, entra aux Etats-Unis en 1872 en qualité d'étudiant, et obtint dans les années qui suivirents des diplômes de l'université de Yale et de la faculté de droit de Columbia. Il sollicita son inscription au barreau de New-York, mais celle-ci lui fut refusée dans la mesure où il n'avait pas la nationalité américaine (ce qui, à l'époque, était une condition d'inscription). Il sollicita alors sa naturalisation, qui lui fut accordée en 1888 par un juge de New-York, et qui lui permit de s'inscrire au barreau de New-York cette même année.

Mais en 1890, Hong Yen Chang, qui désirait s'établir en Californie, vit sa demande d'inscription au barreau de cet Etat rejetée. Les juridictions californiennes estimèrent que le certificat de nationalité de Hong Yen Chang, obtenu devant un juge de New-York, était nul et non avenu, dans la mesure où il était contraire à la (tristement célèbre) loi d'exclusion des chinois de 1882. Elles en conclurent que Hong Yen Chang, de "race mongole" (sic) ne pouvait se prévaloir de la qualité de citoyen américain et, par suite, obtenir son inscription au barreau.

La demande d'inscription posthume de Hong Yen Chang est le résultat d'une initiative d'une associations d'étudiants (l'APALSA) de l'Université de Californie (Davis) et d'un professeur de cette université, Jack Chin. Comme le rappelle le blog ImmigrationProf, elle fait suite à des initiatives similaires dans les Etats de Washington et de Pennsylvanie, qui ont permis d'obtenir des inscriptions posthumes de victimes des lois raciales.

L'affaire n'est pas sans rappeler, dans un autre ordre d'idée, la procédure de révision (coram nobis) qui permit la réhabilitation, en 1983, de Fred Korematsu, ressortissant américain d'origine japonaise injustement interné durant la deuxième guerre mondiale, et qui avait contesté à l'origine sans succès son internement devant la Cour suprême des Etats-Unis (Korematsu v. United States, 1944). Une équipe d'historiens et d'avocats (notamment l'historien Peter Irons et l'avocat Dale Minali) obtint la révision d'une des condamnations pénales qui avait été prononcée dans le cadre de cette affaire (étant précisé, toutefois, que Fred Korematsu était bien vivant en 1983, à la différence Hong Yen Chang).

No comments:

Post a Comment