Tuesday, March 10, 2015

Montesquieu a toujours sa table à la Cour suprême

Les bordelais peuvent être fiers (il parait que c'est leur spécialité) : une opinion de la Cour suprême vient une fois de plus de faire référence à Montesquieu. La Cour suprême a rendu hier sa décision dans une affaire Perez v. Mortgage Banker Association,. L'affaire elle-même, bien que fort intéressante pour ceux qui s'intéressent au droit administratif américain -il y en  a-, est un peu technique. La question était de savoir si, lorsque l'administration modifie par une nouvelle circulaire l'interprétation d'un texte qu'elle a donnée une circulaire précédente, elle doit procéder de la même manière que lorsqu'elle édicte une nouvelle circulaire, c'est à dire en sollicitant les commentaires du public sur le projet de circulaire (la procédure de "notice and comment", qui est une sorte d'enquête publique). A l'unanimité, la Cour répond à cette question par la négative et jette aux oubliettes la théorie en vigueur depuis plusieurs années devant la cour d'appel fédérale de Washington DC, qui estimait que la modification d'une circulaire interprétative doit être soumise aux commentaires préalables du public.

Dans une opinion concurrente (p. 5-6 de l'opinion provisoire), le juge Clarence Thomas se fend d'un petit développement sur la séparation des pouvoirs, qu'il assortit de références à John Locke et à Montesquieu (L'esprit des lois, Livre XI). A l'heure où les références au droit comparé se font un peu rares dans les opinions de la Cour -pour éviter les polémiques inutiles, sans doute-, on peut donc se féliciter que les philosophes des Lumières aient toujours les faveurs de la Cour. Dans le passé, des arrêts de la Cour ont déjà fait référence à Montesquieu, Voltaire et Rousseau (il faudra me croire sur parole, je n'ai pas eu le temps de retrouver les références). Au registre des auteurs français, on notera que Tocqueville a fait aussi quelques apparitions. Enfin, dans les affaires portant sur le droit international, le juge Scalia est friand de référence à Emeric de Vattel (1714-1767), qui était suisse mais qui écrivait en français -voir notamment Arizona v. United States (2012).

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